#Datagueule décrypte sur Youtube les grands enjeux de notre temps à travers des données chiffrées, des graphiques animés et des interviews de spécialistes. Pour cette chaîne aux 700 000 abonnés, j’ai écrit les épisodes des deux dernières saisons.
En 2019, j’ai commencé à écrire pour la série Youtube #Datagueule… Et cet exercice d’écriture renouvelé ensuite au fil des mois n’a cessé de me passionner.
Il faut d’abord oser s’attaquer aux grandes questions de notre temps : la dépendance aux réseaux, le fantasme du tout électrique, l’épouvantail de la dette, le raidissement de la parentalité, la fin du miracle des antibiotiques. Les sujets ne manquent pas.
Il s’agit ensuite, avant toutes choses, de fouiller, rassembler les sources, se noyer sous les données, engloutir des chiffres, dévorer les articles… Et dans cette abondance de lectures, il y a toujours ce creux, cet instant où la vague l’emporte. Le temps de la sidération. Ce moment où l’on saisit l’ampleur de la manipulation des Facebook, Twitter et Instagram . Et cette évidence : une heure que je n’ai pas regardé mon téléphone. Une heure seulement. Ce moment où l’on réalise que les blocs de bétons dans lesquels on vit assèchent les écosystèmes. Et ce vertige : combien de plage ont-elles été sacrifiées pour me porter sur ce 5e étage d’où je travaille ? Ce moment où l’on comprend que la dette est un piège rhétorique qui ne peut que rimer avec austérité. Pendant un instant, les mécanismes de notre monde nous semblent trop implacables, trop féroces pour être déjoués.
Et après ? Après, il faut se forcer à changer la direction de notre regard. Sortir de la torpeur et oser regarder ailleurs : les alternatifs, les bricoleur•euses de solutions, les penseur•euses d’autrement. On trouve un•e invité·e qui nous parle, les yeux brillant, d’un nouveau dispositif qui rebat les cartes. On retrouve de l’humain là où on le pensait perdu.
Et tout doucement, ce n’est même pas un espoir qu’on retrouve, c’est une envie. Une envie de croire au monde du libre. Une envie de recréer des partenariats avec nos eco-systèmes. Une envie de remodeler notre monde pas si complexe pour qu’il ressemble un peu plus à ce dont on aurait pu rêver. Et c’est alors que malgré le blues, le cynisme, la dérision qui nous ont frappés lors de l’écriture de cet épisode, on se dit que quand même ça vaut le coup.
Et on oublie. On a même hâte d’écrire le prochain.
